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UN MONDE D'AVANCE- SECTION LEON BLUM
8 décembre 2007

LA GRANDE ILLUSION DES HEURES SUP

En liant le pouvoir d’achat uniquement à l’augmentation de la durée du travail, le gouvernement promeut une mesure aussi coûteuse qu’inefficace, et dont les effets pervers apparaissent d’emblée, tant pour les salariés, les chômeurs que les chefs d’entreprise.

Travailler plus pour gagner plus ? "Ce slogan de la campagne de Nicolas Sarkozy tourne au fiasco absolu." Pour Michel Sapin, secrétaire national du PS à l’économie et à la fiscalité, "l’objectif de gagner plus n’est pas idiot pour éviter l’érosion du pouvoir d’achat. Mais le ressort fondamental se trouve dans l’évolution des salaires et la meilleure rémunération du travail que du capital. Or les négociations dans les branches et les entreprises sont complètement bloquées aujourd’hui."

Christine Lagarde, ministre de l’Économie, avait pourtant cru bon d’affirmer,le 1er octobre,qu’à travers la défiscalisation des heures supplémentaires, c’était "la première fois depuis longtemps que l’État investissait dans le travail". Mais deux mois après la publication du décret, on ne trouve pas grand monde pour défendre l’efficacité économique de la mesure symbole de la campagne du président de la République. À en croire les économistes, les syndicalistes, et même les chefs d’entreprise, cet investissement de six milliards d’euros de la part de l’État risque de n’être pas très rentable. "Sur cette somme, souligne Michel Sapin, l’allègement de cotisations sociales pour les salariés représente un milliard. C’est pratiquement ce que les franchises médicales reprennent dans la poche des contribuables. Le gain de pouvoir d’achat est ainsi annulé."

Des salariés exclus

S’attacher aux seules heures supplémentaires est une mesure inégalitaire : beaucoup de salariés sont exclus du dispositif. "Il y a des salariés qui vont en bénéficier,notamment ceux qui sont déjà à 39 heures et qui vont avoir quatre heures défiscalisées, a constaté le secrétaire général de FO, Jean-Claude Mailly. Mais cela va être très dur pour les salariés à temps partiel, ceux qui voudraient effectivement travailler plus." Bernard Van Craeynest, président de la CFE-CGC, soulève, au nom des cadres, "le problème de tous les salariés qui sont au forfait jour", et non pas au salaire horaire. Il considère que " cette loi va surtout bénéficier aux salariés en place, et à l’heure où la décrue du chômage est sérieusement ralentie, on peut craindre que cela ne serve pas beaucoup l’emploi".

La mesure peut s’avérer également néfaste pour les travailleurs intérimaires, que les chefs d’entreprise peuvent être incités à remplacer par un recours aux heures supplémentaires. Des experts du Conseil d’analyse économique ont aussi souligné le risque de "blanchiment de primes" : des augmentations de salaires déguisées en heures sup et ainsi financées en partie par l’État.

Des patrons pénalisés

Autre déconvenue, celle des patrons de PME, qui se retrouvent pénalisés. La CGPME (petites et moyennes entreprises) déplore le passage du taux de majoration des heures supplémentaires de 10 % à 25 % pour les entreprises de moins de 21 salariés : "Ce surcoût fait perdre aux petites entreprises l’avantage compétitif dont elles bénéficiaient jusqu’à présent." Un impact d’autant plus lourd pour l’activité économique que sur les 900 millions d’heures supplémentaires annuelles, les trois-quarts sont consommées par les sociétés de moins de 20 salariés. En outre, avec le faible taux de croissance, les employeurs, qui eux seuls décident des heures supplémentaires, ne sont pas prompts à en distribuer.

Alors, comment le gouvernement va-t-il tenter de sauver la face ? "Ils vont enfumer l’affaire, prévoit Michel Sapin. Depuis quelques jours déjà, on entend des spots à la radio qui vantent les mérites de ces heures supplémentaire et donnent évidemment la parole à des patrons qui en sont très contents. Mais la réalité sera autrement dure. Et la déconvenue des salariés risque d’être très grande."

Source : L'Hebdo des socialistes, n° 469, Samedi 8 décembre 2007. Article de Mona Buckmaster.


PS_PA


L'OSCAR DU SLOGAN MISOGYNE

Entre les annonces sur l’égalité professionnelle du lundi et celles sur le pouvoir d’achat du jeudi, la sollicitude pour les femmes n’aura pas duré 3 jours. Travailler plus ? Le gouvernement Sarkozy devrait le proposer aux 900 000 femmes en temps partiel contraint qui, par exemple dans le secteur des aides à la personne, ne parviennent pas à dépasser 15 heures par semaine. Elles ne demandent qu’à travailler davantage ! Mais ce ne sont pas elle qui décident !

Et quant à celles qui travaillent à temps plein et cumulent déjà une double journée, entre boulot, enfants et tâches domestiques, comment vont-elles trouver le temps de faire des heures supplémentaires ? Il leur reste encore la nuit et le dimanche. La droite propose de "libérer" le travail le dimanche. Ce sont principalement les métiers du commerce qui sont visés, ceux dans lesquels les femmes sont nombreuses. Elles apprécieront et les enfants aussi ! "Travailler plus pour gagner plus" mériterait bien d’être nominé aux oscars du slogan misogyne.

Laurence Rossignol, Secrétaire Nationale du Parti socialiste chargée des droits des femmes.

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